Bruce Lee sauve l’honneur

Ah, le racisme anti-chinois. « Ils enterrent des pokémons » : commentaire (subtil) d’un journaliste de BFM (propriété de Patrick Drahi) pendant la retransmission de la cérémonie de deuil national voulue par le gouvernement chinois en mémoire des victimes du coronavirus. Le malheureux s’excuse : sa remarque était « déplacée » (non, elle était raciste), et puis « Ces propos inappropriés ont été diffusés à l’antenne alors que je pensais les micros fermés”. Inappropriés ? C’est vrai que ça ressemble plus à un propos d’ivrogne dans le bar d’une rue périphérique de Reims à 2h du matin. L’ivrogne, on lui pardonne facilement, sa souffrance explique tout. Mais le journaliste grassement payé ? Les Français deviennent la risée du monde

Le mépris des Chinois, ça ne date pas d’hier. Les Occidentaux ont d’ailleurs comme qui dirait une histoire, avec la Chine. Fin du 18ième siècle, la France c’est une bourgade dans le monde. Les trois pays les plus riches, ce sont la Chine, l’Inde, et l’Égypte. La Chine n’importait rien parce qu’elle n’avait besoin de rien, et la seule chose que les Français arrivaient à vendre aux Asiatiques, c’étaient (déjà) les armes. Le marché chinois était totalement fermé. Tout change avec la montée en puissance de l’impérialisme britannique, et la première guerre…de l’opium. Cette drogue que la conscience populaire attribue aux Chinois, ce sont les Britanniques qui ont forcé l’Empereur à l’introduire dans son pays… En 1842, par le traité de Nankin, la Chine doit non seulement accepter le commerce de l’opium, mais ouvrir 5 de ses ports aux commerçants occidentaux. Parmi eux, Shanghai. C’est le début de la ruine de la Chine, du « siècle d’humiliation ».

A l’entrée du parc Huangpu, créé en 1886 dans la concession anglaise de Shanghai, il y avait un panneau qui disait : « Interdit aux chiens et aux Chinois ». Il paraît qu’on le conteste aujourd’hui, au motif qu’on ne trouve aucune photo. Moi, je prends Bruce Lee à témoin. Bruce sort la Fureur de vaincre en 1972, son film le plus politique : les Chinois n’ont pas oublié l’occupation japonaise de la seconde guerre mondiale. Pas sûr que le panneau était encore en place à ce moment, la réglementation sur l’interdiction aux « Chiens et aux Chinois » étant abolie en 1928. Ce qui compte, c’est qu’avec les Occidentaux, les Chinois ont de la mémoire, et savent à quoi s’en tenir : ils n’ont pas oublié qui les a ruinés et humiliés.

Depuis que les États-Unis sont gagnés à leur tour par l’épidémie du SARS CoV-2, on note une nette augmentation de la vente…d’armes à feu. Plus intéressant, les acheteurs sont massivement des Américains d’origine asiatique : ils savent que c’est sur leur pomme que tout va retomber. Qu’un type perde sa pauvre mère du Covid-19, on sent qu’il y a de bonnes chances qu’il aille se défouler sur les Asiatiques du coin. D’ailleurs, c’est déjà ce qu’il se passe. Et Donald Trump ne jette-t-il pas de l’huile sur le feu (et les Américains sur leurs boucs émissaires) en persistant à parler de « Virus chinois » ? Ailleurs, ce n’est pas beaucoup mieux.

En France, ça fait plusieurs mois maintenant que ce racisme anti-chinois traine. On le voit même dans des documentaires d’Arte, en plus subtil que sur BFM. Tout est dans la manière de parler de la Chine. On dit « le gouvernement français », mais « le régime chinois ». La quarantaine de Wuhan était la preuve que la Chine est un pays « totalitaire » et « brutal ». Mais le confinement de la France démontre « la sagesse du gouvernement »… Pourquoi ce confinement si tardif ? Les Chinois n’ont-ils pas annoncé dès le 9 janvier avoir découvert un nouveau virus ? N’ont-ils pas rendus publics dès le 29 février leurs premières conclusions sur les mesures à prendre en urgence pour lutter contre l’épidémie ? Mais en France, c’est une question réglée : quand la Chine parle, elle ment, forcément. Si les mesures françaises ont été si tardives, n’est-ce pas pour beaucoup par…racisme anti-chinois ?

Maintenant, les Chinois envoient leurs médecins partout, livrent des masques à tout le monde, même aux Américains. La Chine tient sa revanche ?

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